acti en prison : rencontre privilégiée avec un grand artiste, Georges Rousse

Quand l’équipe d’acti se met en route pour la prison Saint Paul, le 4 avril dernier, elle sait qu’une rencontre forte l’attend : Georges Rousse, artiste plasticien de renommée internationale, travaille à sa première installation dans le bâtiment H (1) et il a accepté de partager un temps avec l’équipe afin de présenter sa démarche.

(1) : lire le précédent billet pour en savoir plus sur l’évènement « Passages, de la prison à l’université »

Quand acti rencontre Georges

Ce mercredi d’avril, le ciel est gris-sombre et l’accueil chaleureux de Daniel Siino, aux portes de Saint Paul, contraste sérieusement avec l’ambiance de plomb qu’impose le lieu.
Direction le hall visiteurs. Mais avant d’y accéder, trois portes dont deux monumentales, installent déjà l’idée d’enfermement.
C’est là, dans ce hall, dont les murs « pèlent » littéralement leur peinture épaisse, que la rencontre avec Georges Rousse se fait.

Avec des mots simples, il explique sa démarche : à partir d’un espace tridimensionnel dans la réalité (la cellule), il construit une image « à plat » d’un carré bleu sur fond noir.

Avec son smartphone, il présente son dessin préparatoire et le commente : le fond noir projette la cellule dans l’abstrait en faisant disparaitre les stigmates du réel ; quant au carré bleu, il symbolise le carré de ciel que souhaitent voir les prisonniers dans leurs cellules.

Deux versions sont prévues : l’une qui laisse « l’évasion » se faire, et l’autre qui l’empêche symboliquement par une trame faite à la craie sur le carré bleu.

Dans les deux cas, ce qui frappe, c’est la pureté des formes et la géométrie de l’image. Et quand on sait le travail d’anamorphose nécessaire à créer l’abstraction, nous nous inclinons devant tant de génie.

Ecoutez le podcast de cette rencontre

En route pour le bâtiment H. L’équipe acti, se prépare à vivre cette chance : voir l’envers du décor d’une photographie de Georges Rousse, dont l’œuvre est bien le tirage photographique et non l’installation qu’il nécessite.

L’art du partage

Si le génie de l’artiste s’exprime dans la conception – dont il est l’unique auteur –, la réalisation quant à elle est un processus que Georges Rousse partage. En l’occurrence, sur les trois installations de la prison Saint Paul, c’est accompagné d’un groupe de jeunes en insertion de l’association « Prévenir » (2) qu’il travaille.

Et quand l’équipe d’acti approche de la cellule du bâtiment H, ce sont eux, ces jeunes, qui s’affairent à traduire de leurs mains, l’image pensée par Georges Rousse.

Dans un coin, discret, un appareil sur pied rappelle que l’œil du photographe est présent : l’appareil guide, ajuste, restituant calcul et quadrillage pour cette image 2D née d’un espace 3D.

L’envers du décor est fascinant : l’image prend vie en matières, en mouvements, en gestes concentrés et précis.

La simplicité de l’image finale sera en réalité un trompe l’œil : les formes, les volumes et architectures que Georges Rousse construit sont éclatés, désagrégés, sur les différents plans spatiaux de bâtiments parfois monumentaux.

(2) : Prévention en Isère Rhodanienne (Prévenir) est l’association fondée par Daniel Siino qui est aussi le créateur de l’émission de radio « le Téléphone du dimanche » qui donne la parole aux familles de personnes détenues.

 

Une prison, un artiste, dix jeunes en insertion, trois installations

« Pour exister, mon travail s’appuie sur l’espace. L’idée est de construire mon propre espace indépendant du lieu et de son histoire, comme une sorte d’atelier utopique, détaché du contexte de la prison et qui agit comme le premier geste d’une nouvelle époque : l’Université qui remplacera la prison. »
Georges Rousse à propos de son travail à Saint Paul.

Les trois installations sont donc à découvrir lors des visites organisées par l’Université Catholique de Lyon pendant les  Journées Européennes du Patrimoine des 15 et 16 septembre prochain.

Mémoire d’une rencontre

Pour reprendre les mots de Daniel Siino : « la vie est faite de rencontres et il y a des rencontres qui transforment ».
Ces rencontres avec Georges Rousse ont nourri une certaine idée de ce qu’est un artiste, de ce qu’est le parcours de création d’une œuvre et de ce qu’est, au fond, l’engagement pour une cause, au carrefour d’un parcours individuel.

Dans le prochain billet, à ne pas rater : la visite complète en images.

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